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An Owl, a Garden and the Writer

Première nord-américaine

An Owl, a Garden and the Writer

Sara Dolatabadi

France, Suisse, Iran | 2023 | 1 h 23 min
Persan |
Sous-titres : Français
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Prix du meilleur portrait, FIFA 2024

Mahmoud Dowlatabadi
est l’un des romanciers iraniens les plus prolifiques de notre époque. An Owl, a Garden and the Writer dévoile son histoire personnelle et politique à travers les yeux de sa fille Sara. Présenté à Visions du Réel, au festival Extra du Centre Pompidou et au festival de Busan, ce récit intime entremêle souvenirs familiaux et littérature, sur fond de répression, de résistance artistique et de transmission intergénérationnelle.

En présence du producteur Farhad Mohammadi le 23 mars 2024 à l’Université Concordia — J.A. de Sève à Montréal

Au sujet de Sara Dolatabadi :

Qu’est-ce qui vous a poussé à faire ce film ?


J’ai vu des membres de ma famille quitter l’Iran, volontairement ou de force. Ces souvenirs ont continuellement influencé ma pratique en tant qu’artiste visuelle et réalisatrice, que je vois comme un point de rencontre entre le microcosme du personnel et le macrocosme du politique. À la fin de mes vingt ans, j’ai déménagé à Tokyo, puis à Paris et New York. Mon travail est fortement influencé par cette existence nomade, retraçant ma vie entre différentes villes et différentes personnes.

Vivre loin de ma famille m’a également menée au point d’urgence de commencer ce projet. Au fil du temps, il me semblait de plus en plus nécessaire non seulement de capturer le moment mais aussi, pour l’histoire, d’enregistrer l’histoire de la vie de mon père avec sa voix. En 2015, j’ai commencé à exhumer les souvenirs de ma propre vie à Téhéran. J’ai commencé par des peintures et des dessins de l’appartement de mes parents. Cela a finalement conduit à la production d’un livre d’artiste, Prison & Mémoire (2016), qui explorait les histoires orales liées à la prison de Ghasr à Téhéran, où mon père avait été détenu pendant 2 ans par la police du Shah. Cela a finalement conduit à la vidéo que j’ai présentée comme mon projet final pour l’exposition de fin de MFA, et Un Hibou, un Jardin et l’Écrivain’ est la continuation de ce projet avec plus d’engagement.

En tant qu’artiste, je me suis toujours interrogée sur l’univers créatif de mon père. Ce projet a ouvert la porte à cet univers et a aidé à fournir une autre dimension à notre relation qui m’a également aidée à grandir en tant qu’artiste. Parler du projet avec lui et lui soumettre des idées a été une expérience très joyeuse.

Avez-vous toujours su que vous vouliez faire un film sur votre père ?

Depuis que je suis petite, je savais que Mahmoud est un grand écrivain, et célèbre. Cela n’a pas impacté notre relation en tant que fille et père en tant que tel, mais cela m’a forcée à le voir à travers les yeux admiratifs des autres. En conséquence, il est devenu deux personnes différentes pour moi : Mahmoud le père bien-aimé et Mahmoud le grand écrivain auquel je n’ai pas le même accès. Cette idée de vouloir en savoir plus sur son autre réalité, ou sa vie imaginaire, m’accompagne depuis longtemps. Entrer dans l’imagination de quelqu’un est impossible, mais imaginer son univers créatif a été un processus joyeux. Ce film est ma quête personnelle pour mieux le connaître, une tentative de me rapprocher de son monde imaginaire, à mes conditions.

Mahmoud a documenté de manière métaphorique la vie de ses parents et la sienne dans des romans semi-autobiographiques, qui sont aussi une narration d’un moment de l’histoire iranienne. Dans ses livres, il commence à confronter sa relation avec ses parents et explore les entraves que son éducation a imposées sur lui. J’utilise cette approche comme un tremplin pour mon film et prends la liberté de défier la perception de Mahmoud, et la mienne, de notre dynamique familiale et des événements clés de notre vie. Maintenant Mahmoud est une source d’inspiration pour moi mais ce n’était pas toujours le cas. Quand j’étais plus jeune, je voulais garder mes distances avec lui afin de trouver et d’établir ma propre identité. Mais maintenant, je le vois de plus en plus comme un cadeau et je suis reconnaissante de l’avoir dans ma vie, et que je puisse mieux le comprendre et me relier à lui.

Quand j’avais 16 ans, ma mère m’a dit que si je voulais en savoir plus sur mon origine ou l’histoire de ma famille, je devrais lire le livre de mon père Les Jours Passés des Aînés. Je l’ai lu quelques années plus tard et je m’y suis beaucoup attachée. Mahmoud décrit le livre comme le plus proche de son expérience de vie et dit qu’il a sa propre ombre” dedans. Pour moi, c’est l’autobiographie surréaliste de lui. Finalement, cela est devenu une source d’inspiration pour moi de faire le film. C’est le même livre dont j’ai narré des passages dans le film également.

Quelle importance accordez-vous à la langue ?

Devenir mère et élever un enfant dans une vie nomade m’a forcée à penser à la mort et surtout à la disparition de mes parents. J’ai commencé à craindre le jour où ma langue, le farsi, s’estomperait dans la vie de ma fille et serait suivie d’une aliénation envers ma famille et mon arrière-plan culturel. Et si, avec le temps, sa seule langue devenait celle de son père, le français ? Cette angoisse de la disparition de ma langue ainsi que la peur de la disparition de mon père, ont renforcé ma volonté de réaliser un documentaire sur lui.

Je suis une artiste visuelle, et le langage de mon récit est plus visuel que verbal. Je m’intéresse à tous les espaces entre les mots. Il y a beaucoup de mots dans le film mais il y a aussi beaucoup d’autres choses, le langage visuel est présent dans le film.

Le jardin joue un grand rôle dans le film, il est même dans le titre. Pouvez-vous élaborer sur la fonction du jardin, tant dans la vie de Mahmoud que dans le film ?

Mahmoud vient d’un petit village, et il a commencé à travailler dans une ferme dès son jeune âge donc passer du temps au jardin est une partie importante de sa vie et il y consacre environ la moitié de son temps. Je l’ai choisi comme emplacement principal pour le film car il symbolise un lieu plein de vie et de sécurité, même si cela peut n’être qu’un faux sentiment de sécurité. Aussi, être dans un lieu isolé a aidé à créer une distance entre Mahmoud et sa célébrité. Cela m’a permis de créer un espace intime où le public peut être un observateur silencieux de nos routines quotidiennes et discussions.

Le jardin sert finalement d’intersection entre trois mondes différents : le domaine domestique, accompagné d’événements banals ; le monde intérieur de l’écriture de Mahmoud ; et le monde extérieur immédiat sous la forme du régime répressif. Pour moi, le monde le plus intéressant est celui de l’écriture de Mahmoud et il est inévitable de parler et de montrer les deux autres en toile de fond de celui-ci. Alors que revisiter mon enfance et obtenir un aperçu de l’univers créatif d’écriture de mon père était le point de départ de mon idée pour le film, les voyages que j’ai faits en Iran pour tourner le film ont également aidé à établir un sentiment d’intimité entre mes parents et ma fille. Cela a ensuite également servi à préserver ma langue avec elle. Ce sentiment d’intimité a ensuite aidé à faire évoluer mon concept du film pour incorporer naturellement leur relation dans le film. Cette intimité, associée aux tâches ménagères, a aidé à créer le domaine domestique. Et l’excavation de certains souvenirs sur des événements clés, comme l’emprisonnement de Mahmoud, dans notre vie incorpore les rappels que, même si la vie domestique semble sûre, banale et ordinaire, d’une certaine manière, cela pourrait être une illusion, compte tenu de l’état du monde extérieur.
Autres festivals :
Visions du Réel, Burning Lights Competition, Suisse (2023)
Centre Pompidou Extra Festival, France (2023)
Busan IFF, Corée du Sud (2023)
Doclisboa, Lauréat du prix Droits et Liberté, Portugal (2023)
Réalisation Sara Dolatabadi
Assistant.e direction Yasser Gharooni
Production Farhad Mohammadi
Production exécutive Amir Naderi
Mise en scène Sara Dolatabadi
Conception sonore Viktor Ekrt, Amir Hossein Ghasemi

En partenariat avec

Séance

• Université Concordia - J.A. de Sève, LB-125, Pavillon J. W. McConnell
Samedi 23 mars 2024, 13:30 — 15:00
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Réalisation

Sara Dolatabadi

Sara Dolatabadi

Disponible en anglais seulement

Sara is an Iranian multimedia visual artist. Her life was transformed at a young age when the Islamic Revolution changed the political landscape in Iran and by the Iran-Iraq War, which she experienced through the eyes of a child. These memories influenced her practice as a visual artist and filmmaker, which can be seen as a meeting point between the microcosm of the personal and the macrocosm of the political. After receiving her BFA from Azad Art University (Tehran), she spent the next decade living and exhibiting in Tokyo, Paris and New York. While in New York, she obtained her MFA from Hunter College and, for her thesis, she directed and produced a short documentary, Summer Light, about her family. She currently resides in Libreville, Gabon.

Notes biographiques fournies par l’équipe du film

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