The Children of the Mountain

The Children of the Mountain offre un accès privilégié au sculpteur uruguayen Pablo Atchugarry alors qu’il façonne des matériaux issus de la nature. Plus de 40 ans d’une carrière vertigineuse et infatigable le placent au sommet du monde de l’art. Suivez la construction de son musée monumental qui servira d’espace pour mettre en valeur son héritage et celui de ses contemporains.

En présence de la réalisatrice Mercedes Sader le 21 mars 2024 au Musée McCord Stewart à Montréal

Mot de réalisation

L’art est l’une des choses les plus importantes dans ma vie, et j’y trouve un moyen de comprendre le monde. Surtout l’art contemporain, qui capture l’essence de notre époque. Je considère une œuvre d’art non seulement comme le résultat de la créativité, de l’artisanat et de la technique, mais aussi comme quelque chose de la folie, de la passion, de l’humour, de la peur, et une expression nécessaire de la réalité qui nous entoure. Les artistes éveillent en moi une profonde curiosité : quel est leur moteur créatif ? Comment voient-ils le monde ? Qu’essaient-ils de communiquer aux autres ? Je m’intéresse à sauver ces singularités et à les représenter dans l’une des formes de communication les plus riches qui existent, qui est le cinéma.

Le cas de Pablo Atchugarry est particulièrement captivant pour moi. Il a commencé très jeune, avec des ressources minimales, dans un petit pays éloigné ; mais sa détermination l’a conduit à apprendre et à grandir jusqu’à atteindre la place éminente qu’il occupe aujourd’hui. Cette histoire de succès professionnel dans un domaine aussi incertain que l’art peut être intéressante, mais ce qui m’attire le plus à raconter sont les conflits auxquels il est confronté aujourd’hui. Il est confronté à la construction d’une nouvelle œuvre, un énorme musée ; son agenda social, personnel et promotionnel est vertigineux ; il a 65 ans, et le temps presse, la douleur physique et la fatigue le font craindre de ne pas pouvoir remplir ses engagements. Au milieu de tout ce chaos de la vie, j’ai essayé de représenter une caractéristique de Pablo qui m’attire profondément : son besoin de transcendance. ​“Le matériau dicte,” a dit Ferruccio Musitelli. Pour Atchugarry, le matériau, dans son cas la pierre, contient l’œuvre en lui-même ; la sculpture habite la pierre dès le début. Sa tâche est d’enlever ce qui est superflu et de faire naître dans le monde ​“les enfants de la montagne”. Pour Musitelli, filmer revenait à laisser le sujet parler de lui-même. Il y a une photographie que Ferruccio a prise de Pablo en 1979, en Italie. Vous pouvez y voir le jeune Pablo, velu, barbu et ébouriffé, presque comme un homme des cavernes, portant un bloc de marbre dans une poussette pour bébé. De cette pierre naîtrait sa première sculpture en marbre. Aujourd’hui, 40 ans plus tard, il y a un matériau, la vie de Pablo Atchugarry, qui mérite d’être raconté et partagé. Mon moyen de le faire est le cinéma car — comme l’a dit Andrei Tarkovsky — contrairement à toute autre forme d’art, il élargit, enrichit et concentre l’expérience affective de l’homme, l’augmentant et la rendant définitivement plus longue.

- Mercedes Sader